Vase sur socle « L'esprit de l'homme tendant vers la pureté s'élève du chaos »

"L'esprit de l'homme tendant vers la pureté s'élève du chaos. Une oeuvre emblématique de Paul Bonifas. Paul Ami Bonifas (Genève, 1893 - Seattle, 1967) fut rarement tenté de donner un titre à ses créations. Les quelques cas connus concernent tous des oeuvres ambitieuses, comme ce majestueux vase tronconique juché sur son socle noir, des oeuvres qui devaient constituer à ses yeux des exemples particulièrement significatifs de son art. Il est vrai que L'esprit de l'homme... résume à lui seul les grandes orientations qui guidèrent la démarche du céramiste : le souci d'insérer l'objet d'art dans l'architecture contemporaine (Bonifas avait côtoyé Le Corbusier - avec plus ou moins de bonheur -, dans le cadre de sa collaboration à la revue L'Esprit nouveau, dans les années 1920-1922) ; une esthétique qui doit beaucoup au purisme de son ami le peintre Amédée Ozenfant ; la volonté de moderniser le geste du potier en inventant de nouveaux matériaux et en recourant aux méthodes de l'industrie ; ou encore la «monumentalisation» d'un simple récipient, par exemple en le posant sur un socle. À propos de L'esprit de l'homme..., Bonifas précisait, en 1961, que «cette oeuvre a[vait] été conçue pour occuper une niche dans un corridor au dessin rectiligne6». En réalité, l'oeuvre fut produite en deux exemplaires7. Celui qui nous intéresse sera acquis, probablement dès les années 1930, par Louis Moret, le célèbre créateur de mobilier, galeriste et mécène de Sion; il resta dans les mains de la famille jusqu'à son acquisition par le Musée. Ce chef-d'oeuvre fut présenté dans nos murs à l'occasion de l'exposition Paul Bonifas, céramiste du purisme en 1978. Les deux parties qui composent cette céramique d'apparat ont été réalisées selon des techniques inédites, mises au point par Bonifas entre 1926 et 1930: le contenant est en «faïence dure » craquelée et le socle en terre lustrée noire, une formule qui fit la renommée du potier de Ferney jusque dans les Salons de Paris. Le vase et son support ont été façonnés par moulage. A notre connaissance, Bonifas créa quatre modèles en «faïence dure» de très grandes dimensions (plus de cinquante centimètres de longueur ou de hauteur) dans les années 1930-1932, une période particulièrement féconde dans le parcours du créateur. Trois d'entre eux, dont L'esprit de l'homme..., furent conçus en vue de l'Exposition nationale d'art appliqué qui se tint à Genève en 1931. Grâce à la présente acquisition, ces quatre réalisations exceptionnelles sont désormais représentées dans les collections de l'Ariana" (cf.: Blaettler, Roland, Schumacher, Anne-Claire, Aballéa, Sylvie, Enrichissements du Musée Ariana en 2004, dans Genava, t. LIII, Genève, 2005).